La consultation avec le premier chirurgien
Ma toute première consultation s’est déroulée fin mars si mes souvenirs sont bons.
(Ayant eu cette consultation il y a déjà plusieurs mois, je ne me souviens pas de tout, seulement des éléments importants, donc excusez moi si certains passages sont un peu flous).
Elle mérite d’être racontée, tout simplement parce qu’elle représente typiquement le genre de mauvaise consultation, celle sur laquelle tu vois marqué un gros panneau « retourne toi et fuis… sauf si tu t’en fiches de ton corps. Là tu peux rester, fermer les yeux, et prier ».
Mes parents avaient fait le déplacement spécialement pour l’occasion. Deux heures de route, pour venir à cette consultation avec moi. J’avais choisi de consulter un chirurgien trouvé sur internet, un des deux seuls qui exercaient dans le département sur lequel je vis. Pratique, la clinique était à 10 minutes en voiture de mon appartement. Il avait de très bons avis, certains exprimant une certaines froideur de sa part, mais néanmoins un côté très professionnel et une grande satisfaction de résultat.
Comme je ne comptais pas me marier avec, je me suis dit que tant pis pour son côté cash et froid, l’essentiel c’était de ressortir avec un bon résultat.
J’arrive donc dans le hall, stressée et munie d’une liste interminable de questions que j’avais noté au fur et à mesure des semaines durant lesquelles je trépignais d’impatience.
Ma référence en matière de chirurgie esthétique, c’était Nip/Tuck.
Je m’attendais donc à un Christian Troy en blouse blanche avec les mains jointes en forme de triangle qui allait me regarder et me dire « alors, dites moi ce que vous n’aimez pas chez vous ».
Bon, le chirurgien en question a quelques années de plus de route derrière lui que Julian McMahon, mais il n’en reste pas moins bien conservé pour son age. Très bien même, au point que je me suis demandée s’il faisait des petits échanges avec des collègues pendant des congrès du genre « allez, je te fais un lifting, toi en échange tu me fais mes injections de botox ! ».
Mais là, voilà, grosse désillusion. C’est un peu comme imaginer que tous les lapins sont comme Panpan dans « Bambi ».
Il s’est assis à son bureau, après nous avoir donné la traditionnelle poignée de mains à ma mère et moi-même (mon père était resté dans la salle d’attente. Une histoire de nichons, c’est une histoire de femmes !), et à m’a demandé pourquoi je venais le consulter. Je lui ai donc expliqué que j’avais une ptose mammaire, que je réfléchissais depuis pas loin de dix ans à me faire opérer, et que maintenant je voulais enfin sauter le pas.
Il m’a donc fait passer à côté dans une petite pièce pour m’ausculter. J’enlève ma robe, mon soutien gorge, et là il me dit « oh… vous faites 80…85 de tour de poitrine»
Bon déjà tu te dis « balaise le mec ».
Là je l’ai regardé, bouche bée, et j’ai pu observer sur son visage le même sourire, la même fierté qu’un gamin qui aurait réussit à faire 5 ricochets d’un coup là où son pote n’en aurait fait que trois. C’est limite si j’ai pas vu une troll face à la « like a boss ».
Puis, sans un mot il prend une règle. Oui, une règle… et il commence à mesurer mes seins, et particulièrement la ptose. Il note tous les renseignements sur un morceau de papier et me dit :
« oui alors en effet vous avez une ptose, qu’on peut facilement corriger. On va vous faire trois cicatrices en forme d’encre marine ou T inversé.
Par contre vous avec un sein plus gros que l’autre , il va falloir en enlever dans le sein gauche. «
WHAT ????
En enlever ? Je ne pense pas non… j’ai déjà perdu une taille de bonnet, le gauche il est pas trop trop pitoyable, on va pas en enlever non. Non, non, non.
Je devais tirer une de ces têtes, parce qu’il me fait « non mais c’est pas beaucoup hein, quelques grammes ».
MEME TROIS GRAMMES TU TOUCHES PAS SINON JE MORDS !
« On va aussi réduire la taille des aréoles, elles sont biens trop grosses. »
T’essaye de me faire les seins de qui là, Barbie ? Merde quoi ! Je les aime comme ça, j’ai pas envie d’avoir des petites aréoles en mode « on a perdu l’ile flottante au milieu du saladier de crème anglaise » !
Il a alors pris un ton condescendant pour me dire « par contre il y a une asymétrie dans la hauteur au niveau des sillons, je ne peux rien y faire ».
Aaaaaah enfin un truc contre lequel tu ne peux rien !
Ca peut paraitre un peu fou, mais cette recherche perpétuelle de symétrie et de perfection m’a beaucoup gênée. (moi qui suis pourtant une perfectionniste plus-plus, pour une fois je préférais garder mon identité propre).
Je n’avais pas envie de me retrouver avec une poitrine totalement lisse, sans imperfections, sans particularités. Je souhaitais conserver mes aréoles larges, ma légère asymétrie tant en volume qu’en hauteur des sillons.
Et là je faisais face à un praticien qui semblait obsédé par la perfection. Et pas tant pour mon bien être, pour ma propre demande, mais surtout pour pouvoir afficher un beau résultat à son tableau de chasse. Ca m’a mis terriblement mal à l’aise.
Premier faux pas…
On a continué l’entretien. Il me demande alors quelle est ma taille de soutien gorge.
« 85E »
« Ah non, pour moi c’est pas du E, c’est du C ».
Et là je suis passée durant les semaines à suivre par les 7 étapes du deuil de la grosse poitrine ;
- Le choc : des gros yeux ronds, l’impression de m’être pris une gifle et qu’il avait insulté toute ma famille et mangé mon steack Charal.
- Le déni : « ben non, regardez sur l’étiquette y’a marqué 85 E, et il me va bien ! »
- La colère : « non mais quel gros con, pourquoi il m’a dit ça ?? »
- La tristesse : « Mes seins font en fait… un bonnet C ? Oh non, noooooon » *larme de crocodile*
- La résignation : « Bon ben s’il le dit… après tout il est chirurgien… »
- L’acceptation : « C’est peut être pas si naze un bonnet C. Puis bon c’est comme ça, faut faire avec ».
- La reconstruction : A l’heure actuelle ma reconstruction consiste à me dire que ça va peut être plus joli une fois non ptosé, et que de toute façon si ça ne plait vraiment pas, ben les prothèses c’est pas mal hein ;)
Je sais qu’il y a des tas de filles qui rêveraient de faire un bonnet C, mais pour moi qui ai toujours cru que j’avais un bonnet E, la nouvelle est dure à encaisser.
Ca aussi ça m’a pas aidé à l’apprécier.
Et enfin, on a atteint le summum avec la liste de questions.
Déjà pendant toute la consultation j’avais eu la légère, très légère impression qu’il voulait expédier la chose le plus vite possible (on était vendredi, fin d’après midi, il avait autre chose à faire le coco…).
« Bien, vous avez des questions ? »
« Euh oui… »
Je sors ma liste de mon sac, et je le vois se dire « eh ben, on est pas sortis de l’auberge… »
Moi qui étais toujours nerveuse, ça n’a rien arrangé.
Alors soit, la liste était longue, mais je suis quelqu’un de curieux, qui a conscience qu’on ne laisse pas son corps comme ça à n’importe qui. Et puis ça me semble normal de vouloir savoir quoi, quand, comment. C’est quand même une preuve qu’on ne prend pas l’opération à la légère.
J’ai donc revu ma liste de question en mode rapide, en éliminant celles qui me semblaient les plus bêtes.
J’ai fini par en poser deux ou trois, et chaque fois il m’a répondu de façon rapide, avec un ton qui voulait dire « mais que tu es bête ma fille ».
Bref je me suis sentie très écoutée et très rassurée.
Pour finir je lui ai demandé de me montrer des photos de ses anciennes opérations.
Il faut savoir que vous êtes tout à fait en droit de demander à voir des anciennes opérations du chirurgien.
« Pfff… oui mais ça rendra pas pareil… ça va pas vraiment vous aider… «
Il m’a quand même sorti un album photo datant de 40 avant J.C. et ma montré une réduction mammaire et une masto avec pose de prothèses que j’ai eu le temps de voir pendant deux secondes chrono.
Oui en effet ça aide pas trop trop, parce que ça change pas mal quand même. Je me suis dit « mais, il en fait jamais des mastos ou quoi ?? ».
Plus tard j’ai découvert qu’il était sur le site des chirurgiens esthétiques et qu’il y avait une galerie. Pour y accéder il fallait demander le mot de passe au chirurgien lui-même. Ce que j’ai fait donc, par mail, en ne manquant pas de détailler mes informations personnelles pour qu’il sache que j’étais une potentielle patiente, et pas un voyeur pervers.
Comme réponse j’ai eu droit à un « non mais c’est réservé aux professionnels ».
Bon, apparemment il avait vraiment pas envie que je vois son boulot.
Voilà pour le résumé de ce premier rendez vous. Pas convaincant, et j’ai eu du mal pendant plusieurs semaines .
J’étais partagée entre le fait qu’il était géographiquement très pratique, la peur que tous les chirurgiens soient pareils que lui, et le fait que, clairement, je ne le sentais pas.
Après avoir tergiversé un moment, demandé l’avis de ma famille, d’amis du domaine médical, et glané des infos supplémentaires sur internet, j’en ai conclu qu’il valait mieux en chercher un autre, ne serait ce que pour me donner une seconde idée.
Il faut savoir que même si vous n’allez voir le chirurgien qu’à quelques occasions, vous allez quand même vous retrouver le jour J devant une personne qui va changer votre corps à tout jamais. Il faut donc pouvoir s’endormir en toute confiance (déjà que l’opération en soi est un peu stressante, si en plus vous ne vous sentez pas en confiance ça va être très compliqué pour vous). Un bon feeling est indispensable, il ne vous faut donc pas hésiter à consulter plusieurs chirurgiens jusqu’à trouver le bon, celui dont le travail, la méthode vous parle.
Et j’ai très bien fait de consulter un deuxième expert. Mais ça c’est une autre histoire, à suivre… ;)
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